Extrait du livre « Ci-gît une âme retouvée au Cimetière de l'Ouest »
par Philippe La Hausse de Lalouvière et Marina Carter
Sommaire
Introduction
Histoire et origines du cimetière
Introduction
Cette publication a pour objet principal de répertorier systématiquement les cinq-cents quelques âmes qui se retrouvent dans un espace de 30 mètres par 20 mètres au Cimetière de l'Ouest.
Le cimetière entier a une superficie de 60,000 mètres carrés environ, dont notre lieu de travail ne représente qu’un pourcent. Nous l’avons choisi parce que nos recherches préliminaires en 1988 nous avaient indiqué que David Charpentier de Cossigny y était enterré et nous voulions remettre en valeur le site de son inhumation. Ce faisant, nous avons pu constater que cette section, bien que de faible dimension, comporte néanmoins, un nombre substantiel d'ancêtres français de mauriciens actuels. Nous espérons donc, que ce répertoire sera utile généalogiquement et constituera aussi un premier outil pour la découverte des cimetières à Maurice.
Dans ce répertoire nous faisons d’abord un survol rapide de quelques faits historiques concernant la mort et les enterrements dans cette île. L'établissement des cimetières et en particulier le Cimetière de l'Ouest y est traité.
Nous présentons quelques détails biographiques des individus enterrés dans la section répertoriée ainsi que les faits démographiques présentés en statistiques. Nous interprétons cela dans le contexte de l'époque. Nous avons traité les Cossigny et leur entourage avec plus de détails.
Histoire et origines du cimetière
Les Premières Inhumations à l'Isle de France
L’île Maurice est colonisée depuis 1638, et nous savons qu’il existait un cimetière peu après, car le gouverneur hollandais Reinier Por qui mourut à l’île Maurice, le 7 janvier 1653, fut enterré dans le cimetière au Vieux Grand Port. Le premier cimetière de l’île se trouvait donc au Port Sud Est où les hollandais s’étaient installés. Il n'est certainement pas le premier à avoir été enterré dans l’île. Naufragés et visiteurs comme Jacques Muller, chef commis du Medenblick, qui y est mort le 7 octobre 1607, sont peut-être inhumés dans les terrains non-consacrés. Macmillan nous informe qu'il n'y avait probablement pas de prêtre ou de pasteur attaché à la colonie hollandaise : "The number of Dutch colonists, all belonging probably to the Reformed church, was so small indeed that it was not deemed worthwhile having a clergyman attached to the establishment".
Pendant la période hollandaise (1638-1710) quelques visiteurs célèbres moururent à l'Isle de France, tel le gouverneur britannique de Bombay. Ce dernier, nommé George Weldon, fut enterré en 1697, apparemment à l’endroit appelé depuis Baie du Tombeau. Un autre gouverneur, Georg Frederick Wreeden, qui était mort noyé au large de Maurice fut probablement inhumé dans l’île.
Les Premiers Cimetières Français
Les français, arrivés en 1715, s'installèrent depuis 1721 au Port Sud Est et depuis 1722 au Port Louis. La première paroisse de l'île établie dans le Port Sud Est fut appelée Notre Dame des Anges en 1722. Le 19 août 1738, l’acte de Prise de Possession du Curé de Notre Dame eut lieu quand Gabriel Igou nomma Sr de Laperdrix curé du Sud Est. En 1730, Paul Caradec, aumônier du vaisseau Diane, âgé environ de 40 ans, était inhumé au cimetière dit Notre-Dame des Anges". En 1736 on voit appliquée à l’Isle de France une déclaration du Roi concernant la tenue des registres paroissiaux pour consigner les baptêmes, mariages et sépultures "dans un même registre, selon l’ordre des jours sans laisser aucun blanc"
La fondation de la Paroisse de St-Louis se fit en 1722 et l'acte de prise de possession du Curé de Saint Louis eut lieu le 6 octobre 1737 par Mre Gabriel Igou, donc le premier curé de Port Louis, et l'un des deux premiers prêtres arrivés à l'lsle de France. Un plan de Port Louis en 1759 montre la position de ce "cimetière de l'Enfoncement" situé derrière le Vieux Conseil Supérieur (actuellement entre la rue du Vieux Conseil et la rue du Pouce). Ce cimetière "n'était pas situé, comme on le croit généralement, sur l’emplacement actuel du Jardin de la Compagnie mais sur la rive droite du ruisseau du Pouce, un peu plus haut que l'institut actuel". Cinq inhumations au moins eurent lieu dans l'église Saint-Louis : celles de l’épouse de Mahé de Labourdonnais, Marie Anne Josèphe Le Brun, et de leur fils en 1738 ; et celles de l'épouse de Jean Baptiste Azema, Anne Marie Hubert, d'un enfant d’Adam de Villiers en 1744, et d'Antoine Guiran, chevalier de la Brillanne en 1779.
L'établissement des paroisses suivait l'expansion des colons. En 1734, l’abbé Igou avait vivement protesté auprès du Conseil du fait qu'il n'y avait pas d'église à Pamplemousses pour la population croissante de cette région. Une paroisse fut donc crée à Pamplemousses en 1742. Cette paroisse fut nommée Saint-François d’Assise en l’honneur de François Mahé de Labourdonnais et l'église fut érigée à côté de la maison de M. Boucher en 1757. La Paroisse de St Julien fut créée dans la région de Flacq en 1770 et la paroisse de St Pierre à Moka en 1770. La première fut appelée ainsi en l'honneur du Gouverneur Julien Desroches et la seconde en l'honneur de l'Intendant Pierre Poivre.
Les autres régions de l'île durent attendre l'établissement des cimetières, et entre-temps les habitants eurent souvent recours à des mesures hors la loi afin d'enterrer leurs morts. Bechet raconte qu’un père fut puni pour avoir inhumé son enfant décédé hors d'un cimetière".
Même quand les cimetières furent établis, le manque de personnel occasionnait aussi des irrégularités. Donc, en 1739 Jacques Feger, frère de la Congrégation de la Mission, a été inhumé par les esclaves de l'habitation curiale, dans le cimetière de Notre-Dame des Anges ; le prêtre, M. Laperdrix, curé du Port Bourbon, étant malade et au lit. En 1742 quand Antoine Tardat, colon à Flacq, mourut, en l’absence du curé, il fut inhumé par les soldats dans le cimetière de la paroisse. D'autres inhumations révèlent des crimes des plus sanglants comme celle du 27 février 1774 avec l’inhumation à Saint Julien, Flacq, des restes calcinés de la famille Le HEC, assassinée par le soldat François Despeiron dit Sans Quartier.
Même jusqu'à la période britannique, c'est à dire les années 1820, il n'existait aucun cimetière, ni aucune église aux Plaines Wilhems ; il fallait se rendre à Moka pour un enterrement, ou simplement pour le culte. Ducray raconte qu’il était "plus commode aux habitants des hauts plateaux d'enterrer leurs morts chez eux. Cela explique les tombes que l’on rencontre au (...) Trou-aux-¬Cerfs", comme celles de M et Mme Félix Huet de Froberville, ce dernier enterré au pied du Trou aux Cerfs en 1828. Ce ne fut qu’en novembre 1877 qu’un cimetière fut établi à Curepipe.
Etablissement du Cimetière de l'Ouest à Fort Blanc, Cassis
En 1756 le Procureur Général présenta une requête au Conseil Supérieur pour le déplacement du cimetière du centre de la ville de Port Louis : les prêtres s'y opposeront. Parmi les nombreuses protestations, la réaction du curé du Port Louis, l’abbé Pierre Leonard Leborgne, fut la plus remarquable. Apparemment, il prit la chose tellement au sérieux qu'il en mourut de chagrin !
Pourquoi cette requête ? Parce que le cimetière, situé au centre de la ville, était considéré comme une cause d’infection. En fait, cette mesure fut prise en pleine épidémie de petite vérole. Macmillan ajoute que “previous to 1771 the site of the present Company's Gardens was a cemetery of the worst possible description, for it was a low marshy lagoon, partly covered by the sea when the tide set in, and exposed to the rays of a burning sun when it receded". En fait, entre 1770 et 1830 la plupart des villes européennes ont aussi pris la décision de déplacer les cimetières du centre des villes, mettant fin à la pratique d’ensevelissement dans les églises.
Ainsi, le 1er janvier 1771 on voit la création du cimetière du Fort Blanc (Cimetière de l’Ouest) par le gouverneur Desroches. L'année suivante, le 15 décembre 1772, le cimetière situé près du Jardin de la Compagnie à Port Louis, était clos et supprimé.
Mais ce ne fut qu’une décennie plus tard, c'est à dire en septembre 1782, qu'on vit la désaffectation complète du cimetière situé à Port Louis, et son transfert au Fort Blanc.
Les épidémies de petite vérole ravagèrent l'Isle de France périodiquement, et dans les années 1780 l'escadre de Bussy fut gravement atteinte. En quatre mois 429 soldats et matelots et 106 africains furent perdus. De plus, à l'hôpital du port 150 infirmiers furent atteints par la maladie, et plusieurs en moururent. Toussaint raconte, "la ville du Port Louis offrait un horrible spectacle. Des cochons allaient dans le cimetière, jusque-là resté sans clôture; ils déterraient les corps, et traînaient dans les rues des lambeaux de cadavres". Il nous semble, donc, que le cimetière de l’Enfoncement était toujours utilisé, après sa soit-disant fermeture, et ceci expliquerait la rareté des tombes avant 1790 dans notre section (voir plus loin dans la section statistique).
Après ces incidents, en 1782, le cimetière du Fort-Blanc, fermé jusque là par une haie de raquettes, fut entouré d'un mur de clôture. Et peu de temps après, une ordonnance du 6 février 1783, vint règlementer les enterrements. Nul enterrement ne devait se faire le matin après 8 heures et le soir avant 4 heures en été, - c'est à dire du 15 décembre au 15 avril, - sauf dans les cas particulièrement urgents. Les prêtres de la paroisse devaient aller faire la levée des corps des blancs dans toute l’étendue de la ville comprise entre le ruisseau des Pucelles et celui des Créoles. La levée des corps des enfants devait se faire à la croix élevée devant l'église paroissiale. Les corps des noirs devaient être également portés à ce dépôt. C'est là, en plein air, qu’ils recevaient l’absoute car il était interdit au convoi funèbre des esclaves de pénétrer dans l'église. Cette coutume subsista jusqu’à l’abolition de l'esclavage dans la colonie, "quant à celle d'aller chercher les corps des adultes blancs à domicile elle dut être bientôt abandonnée par suite de la diminution du personnel ecclésiastique vers la fin du gouvernement royal. Elle fut rétablie plus tard sous la Révolution par l’abbé Hoffmann. Toutefois, pour rendre ces courses mains fatigantes, il fut alors décidé qu'elles auraient pour limites le Pont Bourgeois et la Plaine Verte. Ceux qui mouraient dans les faubourgs étaient portés à l'un de ces points où le clergé venait prendre le convoi".
Jusqu'à notre époque, le cimetière du Fort Blanc, maintenant appelé Cimetière de l'Ouest, fonctionne comme tel. Il est sans nul doute le plus vieux cimetière de l'île à être toujours en service.
Nationalité, Statut Social et Importance Historique
Le cimetière ne contient que les gens "libres" car les esclaves de l'époque n'avaient pas le droit d'être enterrés dans ce lieu. Les personnes (enterrées datant d'avant l’abolition de l'esclavage en 1834 étaient principalement, mais non exclusivement, des blancs. Dans notre section, nous n'avons pu retracer aucune personne de couleur, avant le 2oème siècle. Touchant notre section, nous avons constaté la présence d’une magnifique pierre tombale, du 18eme siècle, abritant les restes d'un artisan tamoule (voir photo). Plus de 50% des personnes inhumées sont née françaises, C’est-à-dire née avant 1810 en territoire français.
L’Isle de France est devenue anglaise par la force en 1810 et par le Traité de Paris en 1814. Il y a d'autres nationalités présentes dans notre section, par exemples des suédois, allemands et anglais.
Il nous semble qu’une bonne partie des tombes appartiennent à des gens assez aisés, fait qu'on peut déduire à travers la qualité des pierres tombales, du marbre et des détails des inscriptions. L’occupation la plus citée sur les tombes est celle d'officier de marine, ce qui nous permet de constater également le niveau social assez élevé des personnes inhumées. D'autres occupations des défunts sont : membre de l’Assemblée Coloniale, gouverneur, officier militaire, notaire, chirurgien, négociant, ecclésiastique, fonctionnaire et d’autres.
Quatre gouverneurs français sont morts à l’Isle de France : Magon de la Villebague, Charpentier de Cossigny, Gurian de la Brillanne et Maurès de Malartic. Les deux premiers sont décédés après leurs mandats et meurent donc comme simples citoyens, mais Brillanne et Malartic dans l’exercice de leurs fonctions. Malartic est enterré au Champ de Mars, Brillanne à l’église Saint Louis, Magon au cimetière de Pamplemousses, et la tombe de Cossigny se trouve dans notre section.
Dates des enterrements
La tombe la plus ancienne du cimetière se trouve dans notre section, et est celle de Jean-Pascal Dujonc de Boisquenay, né à l’Orient et officier des vaisseaux de la Compagnie des lndes. Il est mort le 24 février 1774. Sa mort fut suivie de peu par celle de Pierre Lahuppe, archer de marine, qui se trouve près de lui. Natif de Brecey (Manche) il est mort le 27 avril 1774, âgé d'environ 41 ans. Les inhumations dans notre section continuent jusqu'à 1983, mais la plupart des tombes datent de la première moitié du 19eme siècle.
Relations familiales des personnes inhumées
Nous avons observé que dans beaucoup de cas, il y a un regroupement des tombes par le sang ou le mariage. Par exemple, la famille de Thomas Dayot est regroupée dans neuf tombes les unes près des autres, elles contiennent les enfants, gendres et petits-enfants (voir carte). Dans la plupart des cas, on peut deviner aisément la relation entre les gens enterrés ensemble (par exemple Brouard/Bergsten, ou Brun/Merle) mais pour certaines tombes la relation n'est pas évidente.
Les Tombes
La matière première utilisée pour les tombes est du basalte. Tout marbre noir et blanc n'existant pas à Maurice, a donc été importé. La plupart des tombes jusqu'au milieu 19eme siècle est en pierre seulement.
Le style des tombes est suffisamment différent, pour qu'on puisse les dater sans même regarder l'épitaphe.
* fin du 18eme siècle - généralement une pierre rectangulaire placée sur le sol ou juste au dessus supportée par des pierres.
* début du 19eme siècle - les tombes les plus modestes comme celles du 18eme, mais d'autres avec marbre ou élevées jusqu’ à 4 pieds de hauteur supportées par des pierres taillées. On trouve aussi le commencement d'emplacements de grillages en fer et aussi des caveaux.
* deuxième moitié du 19eme siècle - beaucoup de tombes sont surmontées par une colonne carrée en pierre taillée avec sur une ou plusieurs faces des colonnes plaquées de marbres et couronnées par un chapiteau à quatre cornes, ou un ciboire sculpté.
* vingtième siècle - les caveaux de pierre de taille plus grandioses mais sans fioritures, pour les gens aisés.Pour les tombes modestes on trouve du ciment et aussi des carreaux de céramique.
La qualité des inscriptions varie énormément. On trouve dans certaines épitaphes, même de la fin du 18eme siècle, en relief, une qualité de travail qu'on ne trouve plus de nos jours. Mais on trouve aussi, à la même époque, une qualité de gravure très simple, même rustique.
Les deux plus vieilles pierres tombales du cimetière ont une inscription assez rudimentaire (1774). En général, la qualité de la gravure sur marbre, depuis les premières années du 19eme siècle est excellente, mais on constate une certaine détérioration et même un certain manque de finesse à partir du milieu du vingtième siècle.
Il existe aussi des différences qui ne sont pas liées à l'argent ou aux talents, mais qui se situent dans un contexte culturel très particulier. Par exemple, on trouve une préférence chez les familles anglaises pour des pierres sculptées sur un côté en demi-cercle, ou la première ligne de l'épitaphe est gravée. Les pierres tombales anglaises sont souvent placées à la verticale. Les familles françaises favorisent un dessin carré et les pierres placées horizontalement.
Analyse Statistique du Site
Notre échantillon de plus de 250 tombes et de plus de 500 âmes se prête à un certain nombre d'analyses statistiques que nous allons présenter ici.
Le fait que les données sont d’une période qui excède deux siècles rendent parfois les résultats difficiles à interpréter. Démographie, la structure des populations avec le temps, varie considérablement avec le temps. Par exemple pendant les guerres la proportion d'hommes et de femmes peut changer considérablement, en raison des morts aux combats et migration. Pendant les périodes d'immigration on peut s’attendre à ce que le chiffre des jeunes adultes sera en hausse dans la population.
Dans notre section du cimetière il y a presque égalité des sexes 49,7% de mâles et 50,3% de femelles (n= 449 âmes sur 506 âmes). Toussaint montre que d'après les recensements pour la période 1817 à 1935 la proportion des sexes de la population générale au Port Louis est quasi égale pour la période totale mais pour certaines années la proportion peut différer jusqu'à 25%.48
Plus de 30% des tombes font mention du lieu d'origine du défunt ce qui nous donne à penser que dans une jeune colonie comme l'Isle de France il était important de situer ses origines. On constate que les villes de France et les territoires français sont de loin les endroits le plus cités sur les épitaphes. L'endroit le plus cité est l'Isle de France suivi par l'Île Bourbon. La région parisienne et la Bretagne sont aussi largement représentée.
Professions et Occupations
Sur notre échantillon nous avons relevé 33 fois la mention faite de l'occupation du défunt ou d'un membre de sa famille. Il y a plusieurs cas de femmes ou d'enfants d'officiers de marine qui mentionne la profession de leur père ou de l'époux. Les professions suivantes ont été relevées comme suit :
On notera que pour certaines célébrités la famille n'a pas fait mention de la profession.
Détails sur David Charpentier de Cossigny
Le groupement des familles Dayot-Cossigny, et parmi elles notre "âme retrouvée", David Charpentier de Cossigny (CDC) est particulièrement intéressant. Le beau-père de CDC est Thomas Dayot qui est né à Goven vers 1728 et arriva à l'Isle de France en 1747. Il épousa Cécile Gilbert en 1751 qui lui donna au moins dix enfants avant 1766, quand elle mourut. Thomas occupa plusieurs postes de la Compagnie des Indes et devint indispensable dans l'administration des affaires. Plus tard il se lança comme négociant et constructeur ; parmi ses œuvres l'église Saint Louis, plusieurs moulins, des canaux, y compris le canal dit Canal Dayot, et les salines du Fort Blanc. Il finança des opérations de corsaires conjointement avec Charles Pitot qui est inhumé à côté de lui. On peut avoir une idée de son entourage social en examinant les actes d'état civil. A l'occasion du mariage de sa fille, Julie, avec Jacques Charpentier de Cossigny, frère de CDC, on constate la présence du comte de Laperouse, le célèbre navigateur français (page suivante). Plus tard il fut élu à l'Assemblée Coloniale et ce fut lui qui représenta la colonie au baptême du fils du Gouverneur Decaen. Il mourut à l’âge de 86 ans et sa famille fit l'éloge de lui sur son épitaphe (voir ci-dessus).
Mar. de M. Charpentier de Cossigny et Dlle Dayot
Le treize may mil sept cent soixante seize après la publication de bans de mariage et de fiancialle entre Mr Jacques Charpentier de Cossigny ancien capitaine du régiment Daunis fils de Mr Nicolas Charpentier de Cossigny et de De Jeanne Blacquière de Savournan le père et mère d'une part et Dlle Julie Dayot fille mineure de Mr Thomas Dayot ancien commissaire pour la Compagnie et de feue De Cécile Gilbert les pères et mères d'autre part et tous deux de cette paroisse, ne s'étant trouve aucun empêchement je soussigné prefet apostoloqie les ai mariés et leur ai donné la benediction nuptiale selon les règles de notre mère la Ste Eglise en présence de MrsDayot père, de Cossigny frère chevalier Delaunay, et des autres témoins soussigne avec les conjoints -
La fille de Thomas Dayot, Julie Charpentier de Cossigny, est enterrée à quelques pas de lui. C’est le frère de Julie, Joseph, et son beau-frère CDC, qui déclarent sa mort prématurée à 40 ans d'une maladie de poitrine. Quelques mois plus tard, CDC lui-même mourut, "d’après son désir il a été mis aux pieds de sa belle-sœur”, Julie. Quand Jacques Charpentier de Cossigny, époux de Julie, mourut en 1817, “son corps a été réuni aux restes de sa femme et de son frère", mais la plaque en cuivre qu’on sait réunissant les deux pierres tombales n'est plus là.
Mais quand Adélaide Charpentier de Cossigny, épouse de David, mourut en 1825, elle ne fut pas inhumée avec le trio - pourquoi? La raison en est peut¬ être qu'elle fut inhumée avec Emilie Bernard, la fillette de sa filleule, âgée de trois ans, morte quelques jours auparavant.
Pendant que CDC fut Gouverneur de l’Isle de France, son épouse et lui "habitaient une jolie maison de plaisance nommée Oulgareth, à deux petites lieues de la ville environnée de promenades fort agréables qui sont le rendez-vous de tout la ville. C'est là où aboutissent tous les palanquins et les calèches ... M et Mme David de Cossigny donnait là deux fois par semaine, repas, bal et concert à tout ce qu'il y avait d'honnête dans la région. Mesdames de Cossigny, Adélaide et Julie Dayot, étaient on ne peut plus aimables…".
Mais David et Adélaide n’avaient pas d’enfant et après le décès de son époux, Adélaide élève plusieurs enfants, y compris une nièce Marguerite, fille de Jean Baptiste Dayot. David, quand il fut gouverneur, employa son neveu Louis de Cossigny comme aide de camp. Il a eu également un autre neveu, Antoine de Lahausse de Lalouvière, avec lui pendant trois ans, pendant et après la campagne de Suffren aux Indes en 1781-84. Ce fut ce neveu qui donna le nom de son oncle David à un de ses fils, enterré à côté de CDC.
La carrière de CDC débuta à l’âge de 17 ans dans le régiment de la Tour du Pin. Vingt ans plus tard, après des campagnes militaires en Europe, CDC fut nommé Lieutenant-Colonel de régiment de l'Isle de France et se distingua aux Indes sous le bailli de Suffren. Il resta aux Indes jusqu'en 1788 et réussit plusieurs actions d’éclats pour son allié, Nabab Tippo qui le considéra comme son père. Cossigny reçut le brevet de Gouverneur de Pondichéry et Commandant des établissements dans l'Inde pendant une courte période. Il fit devenir Pondichéry une ville fortifiée, il s’occupa de la discipline des troupes et répara la pénurie du trésor.
Il quitta l'Inde pour ne plus jamais y retourner. Il fut nommé Gouverneur de l'Île Bourbon en cette même année, 1788. En peu de temps, il rétablit l'ordre dans cette colonie et quand le Général Conway démissionna de son poste de Gouverneur de l'Isle de France en 1790, ce fut à lui que les habitants firent appel pour prendre les rênes du pouvoir.
Il put rejoindre enfin sa femme à l'Isle de France en juin 1790, mais les bouleversements de la Révolution commencèrent à affecter la vie sociale et administrative de l'île. L’Assemblée Coloniale prit de plus en plus de pouvoir et rendit la gestion de la colonie compliquée. A la fin de 1790, M. de Mac Namara, commandant de station, fut conduit devant l'Assemblée, et questionné sur sa loyauté, dans le contexte désormais changé du système royaliste. La situation se détériora et Mac Namara fut assassiné. CDC ne put le rejoindre à temps pour le sauver. Son corps fut enterré dans ce cimetière, mais personne ne sait exactement où. Ce fut l’incident le plus sanglant de la période révolutionnaire à l'Isle de France.
CDC fut relevé par le général Malartic le 13 décembre 1796 et il occupa différents postes administratifs sous Malartic et passa ses dernières années tranquillement entouré par sa famille.
Mort le 20 septembre 1801, inhumé, il reste toujours parmi ses parents - les Renault de St Germain, Schmaltz, Dayot, la Hausse de Lalouvière et Launay l'entourent, ainsi que l’épouse de son célèbre cousin, Joseph François Charpentier de Cossigny de Palma. Mme de Cossigny, née Menassier, est peut-être la première femme enterrée au Cimetière.
Les familles suivantes sont issues en totalité ou en partie de la famille Cossigny : Rémono, Houbert de Chardenoux, Blandin de Chalain, Charoux, Le Breton, Maurel, Cayeux , Sauzier, Leclézio, la Hausse de Lalouvière, Huet de Froberville, Hardy, Piat, Lenoir, Couve de Murville, Avrillon, Brouard, Doger de Spéville, Lavoipierre et Lagesse.
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